Friday, February 24, 2012

Apaisement de la circulation vs. Sécurité publique?


En octobre dernier, le conseil municipal a confié à la Commission de la sécurité publique le mandat d’étudier l’implantation des mesures d’apaisement de la circulation à la suite de la demande du Service de sécurité incendie de Montréal. Rappelons que l'administration Tremblay-Applebaum s'apprêtait à imposer une forme de tutelle aux arrondissements soucieux de mettre en place des mesures d'apaisement de la circulation, sous prétexte que la non-coordination de l'installation des dos d'âne dans les rues résidentielles de Montréal aboutissait à allonger de plusieurs secondes le temps d'intervention des pompiers.

Tout comme d'autres organismes préoccupés par les questions d'aménagement urbain durable (le CRE de Montréal, le centre d'écologie urbaine, vélo Québec), nous ne nions pas qu'un accès rapide des services à incendie doive être assuré sur tout le territoire de Montréal. Nous tenons toutefois à faire remarquer qu’en cantonnant la question sécurité publique en milieu urbain à un enjeu d'accessibilité du territoire et de fluidité de la circulation, la ville-centre fait preuve à nos yeux d'une d'un manque inquiétant de perspective.

En contribuant à ralentir la circulation dans les rues résidentielles, les mesures d'apaisement de la circulation ne contribuent pas seulement à augmenter la sécurité des résidents, notamment aux alentours des écoles: elles permettent en outre d'augmenter la qualité de vie dans ces quartiers, en aidant à retisser entre les habitants un lien communautaire distendu. La sécurisation de l'environnement lié à ces mesures va par ailleurs dans le sens d'une promotion de la marche et du transport actif au détriment de l'utilisation de l'automobile, dont les coûts  environnementaux, sociaux et économiques ne sont plus à démontrer.

En optant pour ces mesures, les arrondissements ciblés par la décision de la ville centre envoient des messages forts en faveur de qualité de vie de leurs habitants et la construction de communautés vibrantes. Ils sont appuyés par la volonté claire de leurs électeurs et par l'engagement de nombreux comités citoyens. Rappelons aussi que la qualité des milieux de vie est un objectif mentionné explicitement dans le récent Plan de Développement Durable de la Collectivité Montréalaise (2010-2015) ainsi que dans le Projet de Plan Métropolitain d’Aménagement de de Développement, d’avril 2011. La réduction de la place de l'automobile, la promotion du transport actif et la sécurité des piétons y sont décrits comme des enjeux importants, d'où la question suivante: depuis quand les pompiers ont acquis le droit de réécrire les orientations de la ville en matière de planification urbaine?...

Nous avons sous les yeux, en Europe notamment (à Bordeaux, à Copenhague notamment), des exemples de collectivités où des mesures courageuses d'apaisement et une stratégie d'aménagement ambitieuse ont réussi à relancer un projet urbain et à faire de ces villes des références mondiales en termes de qualité de vie. Nous appelons la ville de Montréal à s'inspirer de ces exemples pour réaliser les objectifs mentionnés dans les plans stratégiques de la ville, et à respecter les efforts des arrondissements pour rendre à leurs résidents le plein usage de leur espace public.  

Revenons au point de départ de ce billet, à savoir la Commission de la sécurité publique. Dans le cadre de ses travaux suite au débat de cet automne, la Commission a entendu récemment le chef du Service incendie, qui a présenté ses recommandations. De celles-ci, on ne sait rien, puisqu'à ce jour aucune information sur les débats n'a été diffusé auprès du public: un peu de transparence ne ferait pas de mal... Par ailleurs, nous pensons qu'il est indispensable que différents points de vue puissent être entendus à cette commission: avant tout celui des résidents, des groupes et organismes engagés pour l'apaisement de la circulation dans les quartiers de Montréal, également celui d'acteurs en santé publique et en aménagement urbain. Ça fait des années souvent que ces gens-là travaillent à rendre nos quartiers plus vivables, ils ont bien gagné le droit d'avoir un peu la parole, non? Parce qu'au bout du compte, Montréal et ses habitants méritent des rues plus sûres et des quartiers plus vivants. Non?

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