En octobre dernier, le conseil
municipal a confié à la Commission de la sécurité publique le mandat d’étudier
l’implantation des mesures d’apaisement de la circulation à la suite de la
demande du Service de sécurité incendie de Montréal. Rappelons que l'administration
Tremblay-Applebaum s'apprêtait à imposer une forme de tutelle aux
arrondissements soucieux de mettre en place des mesures d'apaisement de la
circulation, sous prétexte que la non-coordination de l'installation des dos
d'âne dans les rues résidentielles de Montréal aboutissait à allonger de
plusieurs secondes le temps d'intervention des pompiers.
Tout comme d'autres organismes
préoccupés par les questions d'aménagement urbain durable (le CRE de Montréal,
le centre d'écologie urbaine, vélo Québec), nous ne nions pas qu'un accès
rapide des services à incendie doive être assuré sur tout le territoire de
Montréal. Nous tenons toutefois à faire remarquer qu’en cantonnant la question
sécurité publique en milieu urbain à un enjeu d'accessibilité du territoire et
de fluidité de la circulation, la ville-centre fait preuve à nos yeux d'une
d'un manque inquiétant de perspective.
En contribuant à ralentir la
circulation dans les rues résidentielles, les mesures d'apaisement de la
circulation ne contribuent pas seulement à augmenter la sécurité des résidents,
notamment aux alentours des écoles: elles permettent en outre d'augmenter la
qualité de vie dans ces quartiers, en aidant à retisser entre les habitants un
lien communautaire distendu. La sécurisation de l'environnement lié à ces
mesures va par ailleurs dans le sens d'une promotion de la marche et du
transport actif au détriment de l'utilisation de l'automobile, dont les coûts environnementaux, sociaux et économiques ne
sont plus à démontrer.
En optant pour ces mesures, les
arrondissements ciblés par la décision de la ville centre envoient des messages
forts en faveur de qualité de vie de leurs habitants et la construction de
communautés vibrantes. Ils sont appuyés par la volonté claire de leurs
électeurs et par l'engagement de nombreux comités citoyens. Rappelons aussi que
la qualité des milieux de vie est un objectif mentionné explicitement dans le
récent Plan de Développement Durable de
la Collectivité Montréalaise (2010-2015) ainsi que dans le Projet de Plan Métropolitain d’Aménagement
de de Développement, d’avril 2011. La réduction de la place de
l'automobile, la promotion du transport actif et la sécurité des piétons y sont
décrits comme des enjeux importants, d'où la question suivante: depuis quand
les pompiers ont acquis le droit de réécrire les orientations de la ville en
matière de planification urbaine?...
Nous avons sous les yeux, en
Europe notamment (à Bordeaux, à Copenhague notamment), des exemples de
collectivités où des mesures courageuses d'apaisement et une stratégie
d'aménagement ambitieuse ont réussi à relancer un projet urbain et à faire de
ces villes des références mondiales en termes de qualité de vie. Nous appelons
la ville de Montréal à s'inspirer de ces exemples pour réaliser les objectifs
mentionnés dans les plans stratégiques de la ville, et à respecter les efforts
des arrondissements pour rendre à leurs résidents le plein usage de leur espace
public.
Revenons au point de départ de ce
billet, à savoir la Commission de la sécurité publique. Dans le cadre de ses
travaux suite au débat de cet automne, la Commission a entendu récemment le
chef du Service incendie, qui a présenté ses recommandations. De celles-ci, on
ne sait rien, puisqu'à ce jour aucune information sur les débats n'a été
diffusé auprès du public: un peu de transparence ne ferait pas de mal... Par
ailleurs, nous pensons qu'il est indispensable que différents points de vue
puissent être entendus à cette commission: avant tout celui des résidents, des
groupes et organismes engagés pour l'apaisement de la circulation dans les
quartiers de Montréal, également celui d'acteurs en santé publique et en
aménagement urbain. Ça fait des années souvent que ces gens-là travaillent à
rendre nos quartiers plus vivables, ils ont bien gagné le droit d'avoir un peu
la parole, non? Parce qu'au bout du compte, Montréal et ses habitants méritent
des rues plus sûres et des quartiers plus vivants. Non?